La science s'intéresse à l'importance du sommeil
De nouvelles recherches, présentées au mois de juin au congrès de l'Académie américaine de la médecine du sommeil, ont cherché à démontrer par quels mécanismes la privation de sommeil décuplait notre degré d'anticipation aux émotions imminentes.
Les chercheurs du laboratoire du sommeil et de l'imagerie neuronale de l'université de Berkeley (Californie) ont étudié les scanners cérébraux de 18 adultes soumis à des tests cognitifs au cours de deux sessions, l'une suivant une nuit de sommeil normale et la seconde après une privation de sommeil de 24 heures. « Ces tests consistaient à exposer les patients de façon aléatoire à des stimuli négatifs ou neutres afin d'observer leurs réactions », explique Andrea Goldstein, principal auteur de l'étude.
L'imagerie médicale a révélé que la privation de sommeil amplifiait de manière significative l'activité d'anticipation dans l'amygdale, une partie du cerveau associée à la réponse aux expériences négatives et désagréables. Dans certaines zones de ce centre émotionnel du cerveau, la privation de sommeil a déclenché une augmentation de la réaction anticipée de plus de 60 pour cent. Une intensité qui s'avère également corrélée à un penchant naturel à l'anxiété. « Les patients qui étaient connus pour leur anxiété ont montré la plus grande variation de leur capacité d'anticipation », précise l'étude.
« L'anticipation est un mécanisme cérébral fondamental que partagent nombre d'espèces, rappelle Sylvie Royant-Parola, psychiatre responsable du centre d'exploration du sommeil de Garches (92) . Cette mise en alerte n'est pas foncièrement négative et sert au contraire à nous préparer à des situations de danger. Il s'agit donc d'un mécanisme de survie. Mais lorsque celle-ci est exacerbée et se transforme en une hyper réactivité, elle devient négative et se caractérise par un stress, voire une anxiété sévère. »
Les chercheurs de Berkeley jugent ce phénomène de plus en plus en plus inquiétant pour la société américaine qui subit une érosion continue du temps de sommeil.
Or, le problème de la privation de sommeil, loin de se limiter aux États-Unis, devient également un véritable problème de santé publique dans l'Hexagone. Si les Français sont encore loin du record américain avec un temps de sommeil moyen de 6h45 contre 6 heures pour leurs voisins d'outre-atlantique, ce quota semble insuffisant au regard des besoins moyens qui se situent autour de 7 à 8 heures. « Ce chiffre statistique ne représente rien à l'échelle individuelle, précise Sylvie Royant-Parola. Certains petits dormeurs se contentent de 6 heures de sommeil tandis que d'autres ont besoin de 9 heures pour se sentir reposés, l'essentiel étant de respecter son propre quota. Mais il montre une dette de sommeil dans la population française globale. Or une heure de sommeil en moins sur 24 heures suffit à ressentir les effets délétères de la privation de sommeil, et une dette de sommeil ne se rattrape pas, contrairement aux idées reçues », rappelle la psychiatre.
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