Des cellules toujours vivantes
17 jours après la mort
Ils travaillent dans cette Mecque de la science du vivant que demeure l’Institut Pasteur. Avec leurs collaborateurs (Mathilde Latil, Pierre Rocheteau, Laurent Châtre, Serena Sanulli, Sylvie Mémet et Miria Ricchetti), Tajbakhsh et Chrétien viennent de découvrir l’existence jusqu’ici ignorée d’un réservoir de cellules souches toujours bien vivantes présentes au sein de tissus musculaires de cadavres humains dont le cœur ne battait plus depuis dix-sept jours.
On peut, comme le fait l’institution pastorienne, ne voir là qu’un nouveau et précieux gisement de matériel cellulaire thérapeutique. Demain les cadavres humains pourraient fournir, outre des organes et des tissus destinés à être greffés sur des vivants, des cellules capables de redonner vie à des pièces dégénérées de corps vieillissants. On peut aussi, raisonnablement, soulever quelques questions complémentaires.
Comment l’équipe française a-t-elle pu en arriver là? «L'idée de ces expériences m'est venue en observant au microscope des cellules musculaires prélevées lors d'une autopsie, explique simplement, dans Le Figaro, Fabrice Chrétien, spécialiste de neuropathologie à l’hôpital Raymond Poincaré de Garches et professeur à l'université Versailles Saint-Quentin. Alors même que toutes les cellules de leur environnement étaient complètement détruites, ces cellules souches conservaient un bel aspect». Pourquoi diable une telle performance?
Comment comprendre que des cellules, fussent-elles souches, puissent survivre dans un environnement sans oxygène et très précisément aux antipodes de la vie? Un peu à la manière des mammifères entrant en hibernation. Pompe cardiaque comme désamorcée. Respiration bien en dessous de ce que l’on tient généralement pour être le minimum vital; et sommeil plus que profond donnant l’apparence de la mort. Mais le tout à l’échelon cellulaire.
On parle ici d’état de quiescence. Plus précisément le spectaculaire tient au fait que ces cellules se débarrassent des mitochondries — ces organites qui, présents, en leur sein leur servent à respirer. Les chercheurs n’expliquent pas les raisons premières qui poussent ces cellules à agir de la sorte. Ils ne nous éclairent pas non plus sur la durée de cette hibernation microscopique. Pour savoir si les dix-sept jours peuvent être dépassés il leur faudrait désormais disposer de cadavres plus âgés...