La confiance, une certitude ?
Hier j’ai eu l’occasion de voir des examens de praticiens, ce qui m’a donné envie d’écrire un article sur la confiance, qui était en attente depuis déjà quelques temps. A l’occasion des formations et dans ma pratique, j’ai l’occasion de voir beaucoup de personnes travailler sur la confiance. Mais ça veut dire quoi exactement la confiance ? Et dans la pratique de l’hypnose, plus particulièrement ? J’aborde ce sujet avec mon regard sur la confiance, ma façon de voir et mes croyances, vous y trouverez peut-être des éléments intéressants pour vous ou vos clients.La confiance n’est pas la certitude
Dans ce que j’entends ici et là, je remarque que beaucoup de personnes, dans leur présupposés, mélangent la confiance et la certitude. Pour moi, avoir confiance, c’est avoir confiance dans ses compétences et ses outils, ou ceux de l’autre, mais ça ne veut pas dire qu’on sait à l’avance comment ça va se passer, ni qu’on peut connaître le résultat. Par exemple, si je dois parler en public, je peux avoir confiance dans ma façon de parler, de m’adapter aux situations qui viendront, confiance dans le sujet que je vais aborder, mais puis-je savoir à l’avance comment chaque personne de l’audience va y réagir ? non, bien sûr. On ne peut pas être certain du résultat avant de l’avoir fait. Imaginez une vie ou vous êtes certain de tout ce qui va arriver, cela serait bien ennuyeux non ?En conséquence de ce mélange entre confiance et certitude, la confiance en soi est trop souvent injustement placée à une échelle identitaire : « si je rate, je suis nul, je suis un bon à rien, j’y arrive pas, j’y arriverai jamais ». Un échec, si tant est que cela existe, devient alors un échec personnel, au niveau de l’identité. Lorsque c’est la confiance dans les compétences et les outils, « l’échec », se place à un autre niveau, celui des comportements et des capacités, l’identité n’est pas remise en question. Pour ceux qui ont reconnu les niveaux logiques de Robert Dilts, vous savez sans doute qu’il est souvent plus facile de travailler aux niveaux des capacités et des comportements plutôt qu’au niveau identitaire, qui demande souvent beaucoup de précautions et un travail sur l’écologie très fort.
Lorsque la confiance reste placée à un niveau identitaire, toutes les conséquences sont de notre fait et souvent les gens se remettent en cause, eux, à ce qu’ils sont en tant que personne, en tant qu’être humain. Des questions polluent alors l’esprit sans cesse : « que se passe-t-il si j’échoue ? que se passe-t-il si je rate ? que se passe-t-il si le client ne change pas ? ». Ces questions nous mettent dans un état interne centré sur nous-mêmes, ce qui ne favorise pas un rapport à l’autre nécessaire à un travail avec un client, ou un rapport avec un public ou avec la vie en général.
Je trouve intéressant qu’en anglais il y ait deux mots différents : trust et confidence. « Trust », traduit la confiance en l’autre en tant que personne, son honnêteté, sa bienveillance. « Confidence », traduit la confiance dans les capacités et les compétences. Il est possible de se faire confiance en tant que personne, et de ne pas encore avoir assez confiance dans ses capacités et ses compétences, ce qui demande du travail, de l’entrainement et de la pratique et ce qui ne touche pas à l’identité, ce qui est quand même souvent plus agréable à gérer.
La confiance : accepter et utiliser ses émotions
Pour moi, une des premières étapes est d’accepter les émotions qui viennent avant de devoir parler en public, de réaliser un exercice ou de voir un client.Je pense que tout le monde a déjà entendu dire que la plupart des émotions et des comportements pouvaient avoir une intention positive. Lorsqu’on accepte ses émotions, et qu’on se concentre sur leur intention positive, c’est déjà bien souvent différent. Stressé avant de parler en public ? quelle est l’intention positive ? ne pas avoir l’air bête ? se dépasser ? travailler encore plus pour réussir ? peu importe, accepter l’intention positive, la remercier même, est, comme vous le savez sans doute déjà, une des premières étapes pour pouvoir travailler à l’exprimer autrement, par de l’auto-hypnose ou un accompagnement.
Et si ça ne se passe pas comme on le souhaite, au pire, c’est un apprentissage, une façon d’apprendre à faire autrement, à chercher à développer d’autres outils, d’autres compétences. Qui n’a jamais vu quelqu’un donner le meilleur de lui-même, sans que ce soit forcément excellent, voir même pas terrible ? Et pourtant, ce n’est pas de la critique sur ce qui a été fait qui vous vient, mais du respect et de l’admiration de voir quelqu’un avoir dépassé ses peurs et donné le meilleur de lui-même dans cet instant et en tirer un réel apprentissage. Qui n’a jamais plus admiré quelqu’un qui est sorti de sa zone de confort, qui a testé et tenté des choses, que quelqu’un qui reste dans ce qu’il sait faire et qui le fait comme un robot ? L’émotion rend souvent les choses plus fortes, magiques, et toutes les émotions, lorsqu’elles sont acceptées et utilisées peuvent permettre cette magie.
Bien sûr, tout cela est facile à dire, même si parfois quelques recadrages en ce sens suffisent à regarder les situations autrement. Mais comment travailler sur la confiance ?
La confiance : l’absence de peur
Si vous vous souvenez de mon article « Le cerveau : ce cinéaste émotionnel » et de l’exemple de la femme qui a les amygdales calcifiées, vous vous souvenez que les émotions qu’elle est incapable de connaître sont la peur et la colère. De ce fait, elle ne sait pas reconnaître des personnes qui ne seraient pas digne de confiance pour la grande majorité de la population avec les amygdales actives.La confiance « ultime », et sans doute dangereuse, serait donc l’absence de peur.
Si vous repensez aussi à mes articles sur l’amygdale (partie 1, partie 2, partie 3, partie 4), faire le lien entre la confiance et les peurs est intéressant. Quelles sont les peurs qui gouvernent le manque de confiance ? Les identifier et les désactiver peut aider à libérer certains blocages, et à gagner en confiance. Peu importe comment vous décidez de les libérer et de travailler dessus, je sais que dans ma pratique, je prête particulièrement attention aux peurs, notre cerveau ayant tendance à faire remonter à la conscience ce qui peut être dangereux pour nous, et qui demande donc notre attention. Si je caricature, si vous avez peur des personnes avec une casquette, lorsque vous marchez dans la rue, vous remarquerez toutes les personnes avec une casquette. Si cette peur n’existe pas, il y a de fortes chances que vous ne les remarquiez même pas.
Appliqué à la prise de parole en public, si c’est une peur du regard de l’autre, il peut être intéressant de définir « regard » (et « autre »). Un regard les sourcils froncés peut résonner à l’intérieur avec d’autres situations, et déclencher du stress. Désactiver ce regard particulier peut supprimer ce déclencheur de stress.
Cela me fait penser à un client que j’ai reçu avec un bégaiement. Il ne bégayait qu’en présence de proches et d’amis. En cherchant le déclencheur, il a identifié qu’un regard particulier, que sa mère reproduisait souvent, déclenchait instantanément le bégaiement. Nous nous sommes amusés avec en séance, j’ai mimé ce regard jusqu’à trouver le juste regard qui le faisait bégayer, et nous avons passé une bonne partie de la séance à jouer avec ça : « hop tu bégayes, hop tu bégayes plus ». Une fois ce déclencheur désactivé, son bégaiement est parti. Intéressant non ?
La confiance EST la certitude
Paradoxe, confusion, transe !Dans la pratique de l’hypnose, et comme Milton Erickson l’a souvent évoqué, la confiance en l’autre est la certitude qu’il peut changer et qu’il en a les capacités. Une confiance absolue en l’autre fait passer un message extraordinaire dans une séance. C’est pour moi une condition essentielle à un rapport orienté vers le changement en séance, ça pose un cadre différent pour les clients, qui ont trop souvent entendu dire qu’ils étaient comme ceci ou comme cela, et que ça ne pouvait pas changer. Immédiatement le client se sent dans une autre position, qui favorise le changement.
En résumé, avoir confiance dans ses capacités et ses compétences tout en ayant la certitude que le client peut changer et qu’il a les capacités permet souvent de conduire les séances d’une autre façon. Un client qui n’entre pas facilement en état d’hypnose ? c’est que la technique utilisée n’est peut-être pas encore la bonne pour lui, c’est qu’il manque encore quelque chose, cela devient une aventure, un jeu du chat et de la souris, chercher ce qui va fonctionner pour l’autre en faisant confiance à ses compétences et ses techniques pour le trouver. Un client qui ne change pas ? C’est qu’il doit y avoir sûrement une bonne raison quelque part, là encore, c’est un jeu de piste, chercher avec le client, travailler en équipe et jouer au jeu du changement.
J’espère que cet article rapide sur ma vision de la confiance vous a plu, on pourrait en dire encore certainement des milliers de choses, mais j’ai la croyance que ces quelques idées semées dans cet article pourront apporter à certains un autre regard sur la confiance et sur la façon de gérer certains clients et certaines séances. En tout cas, ça l’est pour moi
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SOURCE :hypnose pratique