Créateurs inspirés
Ces cinq génies créatifs ont marqué le XXe siècle et nous observent peut-être depuis un autre monde... Là où tout a commencé ?
Sous l’influence de son esprit guide
- Madge Gill -
Peintre médium britannique à l’oeuvre magistrale, Madge Gill (1882-1961) est l’une des figures les plus emblématiques de l’art brut et médiumnique. Par art brut, le peintre français Jean Dubuffet nommait des productions de personnes exemptes de culture artistique comme des prisonniers, des mystiques ou des révoltés et même parfois, des malades mentaux. Enfant illégitime, Madge Gill, née en 1882 à Londres, est d’abord cachée par sa mère et sa tante, puis placée dans un orphelinat à l’âge de neuf ans. Envoyée au Canada pour travailler dans une ferme, elle rentre en Grande-Bretagne à dix-neuf ans, devient infirmière, épouse son cousin dont elle a trois fils. C’est après l’accouchement de son troisième enfant, mort-né, que sa vie prend un tournant décisif. Alitée pendant plusieurs mois, elle vit des complications de santé qui lui feront perdre l’usage de son oeil gauche. Alors que sa tante l’initie à l’astrologie et au spiritisme, elle commence alors à s’adonner à la peinture. Elle aime travailler la nuit, très faiblement éclairée à la bougie, de façon quasi automatique et très rapide, dans un état que l’on pourrait qualifier de transe. Elle produit aussi des broderies incroyables et des écrits étonnants.
L’un de ses chefs-d’oeuvre est une robe, que l’on peut découvrir au sein de la Collection de l’art brut, à Lausanne en Suisse. Cette femme hypersensible et réservée refuse de vendre ses oeuvres qui appartiennent, selon elle, à son esprit guide qu’elle nomme Myrninerest (soit my inner rest, que l’on pourrait traduire par « mon plus intime » ou « mon repos intérieur »). Ses dessins vont du calicot pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres (jusqu’à 36 mètres de long !) à la carte postale en passant par des formats intermédiaires, le tout travaillé à la plume et à l’encre noire avec quelques rares écarts de couleur. Ils représentent la plupart du temps une figure féminine, plutôt chic, qui évolue dans un monde irréel à l’architecture géométrique, labyrinthique, démesurée, improbable... Il faudra attendre 1961, après sa mort, pour découvrir chez elle des centaines de dessins empilés dans des placards ou sous les lits. Une oeuvre absolument fascinante, habitée, excessive !